Corbaccio, Corvino, Voltore and friends

Les inoubliables figures de Ben Jonson, dans Volpone, revivent en ce moment à Paris au théâtre de verdure au pré Catelan, bois de Boulogne.

On en a vu des Volpone au théâtre, et au cinéma, au moins deux versions, celle classique de Maurice Tourneur, avec une distribution incroyable (Harry Baur, Louis Jouvet – dans le rôle de Mosca -, Fernand Ledoux, Charles Dullin, etc.), et celle plus récente de la télé en 2003, mais qui ne marquera pas les annales, avec pourtant une belle distribution aussi (Depardieu, Prévost, Hirsch, Jugnot, Sastre, Stévenin). La pièce a été réécrite dans les années 1920 par Stefan Zweig et Jules Romains, une version plus ramassée que l’originale, très efficace, et brillante. Mais à quoi s’attendre d’autre de la part de Zweig et Romains ?

Cette fois-ci, curieusement, la réalisatrice, Carine Montag, n’a pas repris cette version, mais créé la sienne propre, une nouvelle modernisation du texte de Ben Jonson en somme. On peut préférer celle des années 1920, plus drôle et plus enlevée, mais ça reste plaisant. Il est vrai que le scénario est en béton, l’histoire imaginée par Ben Jonson est tellement forte qu’elle passera toujours. Quoi de plus efficaces que l’avidité, la soif de l’argent, la lâcheté, la luxure, comme ressorts de l’action. L’un est prêt à prostituer sa vertueuse épouse pour se voir coucher sur le testament, l’autre va jusqu’à déshériter son fils…

Rappelons les personnages de cette aimable ménagerie vénitienne imaginée par Ben Jonson, qui, comme Shakespeare, prend l’Italie pour cadre, pas étonnant, l’Italie de la Renaissance est le modèle et le phare de toute l’Europe au XVIe et début du XVIIe siècle.

Volpone, ou le renard, riche marchand vénitien, jouant les mourants pour se venger de ses créanciers, se distraire et récolter des présents.
Mosca, la mouche, son serviteur, qui finit par le chasser à la fin et s’emparer de ses biens dans la version de Zweig et Romains.
Voltore, le vautour, avocat de son état.
Corbaccio, le corbeau, usurier qui donne sa femme pour être sur le testament.
Corvino, la corneille nécrophage qui déshérite son fils.

Le cadre du spectacle, le bois, les arbres centenaires, les cris des enfants au loin, la représentation à 360° où l’on tourne sa chaise pour suivre l’action, font beaucoup au succès de la pièce. Les spectateurs sont en tout cas enthousiastes, nous aussi. Mais c’est Volpone, ça marche à tout coup. Trois mentions pour l’avocat Voltore, Walter Hotton, et sa tirade géniale pendant le procès ; l’usurier Corvino, remarquable Arnaud Bruyère, retors à souhait ; et finalement Mosca, inquiétant et beau Loïc Chalumeau.

La représentation la plus extraordinaire qu’on ait vu était à Lyon, dans les années 1980, un petit théâtre. Chaque rôle était représenté de façon très poussée, avec des acteurs amateurs mais superbes, suscitant le rire, et même le fou rire. Un spectateur à côté de nous, pas un habitué du théâtre visiblement, mais venu voir son copain qui jouait dans la pièce, était tellement secoué de rire qu’à un moment il est tombé par terre de son siège ! Il s’attendait sans doute à s’ennuyer, était venu là par amitié, et découvrait la magie du théâtre et la force de la relation directe avec la troupe.

Ce dimanche 5 septembre :

Sur le film de 1941.

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3 Réponses to “Corbaccio, Corvino, Voltore and friends”

  1. Léo Says:

    Superbe! Merci.

  2. Jacques Says:

    Merci à toi. 🙂

  3. Petite planète « Le journal de Joli Rêve Says:

    […] la décadence ottomane, on retrouve le scénario de Volpone […]

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