Surprise à Pizzo, sur la côte nord de la Calabre : un musée consacré à Murat. L’évocation émouvante de la fin d’une épopée bien française, la mort du maréchal de Napoléon, fusillé ici en 1815, à 48 ans seulement. Dans le château local, dit Castello Murat, un château aragonais du XVe siècle, on trouve la présentation style Mme Tussaud du procès et de l’exécution de celui qui fut roi de Naples de 1808 à 1815 et qui y passa ses derniers jours.
Murat a participé à toutes les batailles, la campagne d’Italie, l’expédition d’Egypte, le coup du 18 Brumaire, Austerlitz, Iena, Eylau, Marengo, etc., la guerre d’Espagne, la campagne de Russie, ses charges de cavalerie légendaires, où il fait basculer l’issue du combat, ne se comptent plus. Toutes les batailles, sauf une, Waterloo, car Napoléon se brouille avec son beau-frère à la fin du règne (Murat a épousé Caroline Bonaparte en 1800, eu quatre enfants avec elle et a donc une descendance de princes napoléoniens). Et cette absence à Waterloo a peut-être été fatale à l’empereur.
C’est en tentant de récupérer son trône, le royaume de Naples, que Murat est arrêté au Pizzo, jugé sommairement par un général acquis aux Bourbons, et exécuté. Il commande lui-même le peloton, avec ces mots : Soldats, droit au coeur, mais épargnez le visage ! Feu !
Murat est l’objet d’un culte en Italie, il est considéré comme un précurseur de l’unité du pays, Garibaldi et bien d’autres lui ont rendu hommage à ce titre. Au XIXe siècle, il est pour tous le plus grand cavalier de l’époque, ses charges sont enseignées dans les écoles militaires, comme à West Point. Custer le considère comme son maître et son héros. Ainsi que cela apparaît dans le film de Raoul Walsh, They Died With Their Boots On, avec Errol Flynn dans le rôle du général George Armstrong Custer.
L’échange célèbre entre Napoléon et Murat, à Eylau en février 1807, quand les troupes françaises plient devant les Russes, est relaté un peu partout : Nous laisseras-tu dévorer par ces gens-là? lance Napoléon à son beau-frère, et Murat prend la tête de la plus grande charge de cavalerie de l’histoire contemporaine, avec 12 000 hommes, hussards, dragons, cuirassiers, à une époque où la cavalerie jouait le rôle des chars et des hélicoptères, au cri de Chargez ! Tout cela est à moi !
Eylau est une victoire à la Pyrrhus, la Grande Armée perd 12 000 hommes, dont huit généraux, les Russes se sont battus avec une ardeur inattendue et pour la première fois il apparaît que Napoléon n’est pas invincible. Hugo en a fait un poème fameux de La légende des siècles :
Le soir on fit les feux, et le colonel vint,
Il dit : « Hugo? – Présent. – Combien d’hommes? – Cent vingt.
– Bien. Prenez avec vous la compagnie entière,
Et faites-vous tuer. – Où ? – Dans le cimetière.
Et je lui répondis: – C’est en effet l’endroit. »
[…]
Sanglant, sur une main et sur les deux genoux
Je me traînai; je dis: « Voyons où nous en sommes.
J’ajoutai: -Debout, tous! Et je comptai mes hommes.
– Présent! dit le sergent. -Présent! » dit le gamin.
Je vis mon colonel venir, l’épée en main.
« Par qui donc la bataille a-t-elle été gagnée?
– Par vous », dit-il. La neige était de sang baignée.
Il reprit: « C’est bien vous, Hugo? c’est votre voix?
– Oui. -Combien de vivants êtes-vous ici ? -Trois. »
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14 juillet 2011 à 10:33 |
Le portrait est de François Gérard (1770-1837).