Avec un peu de blanc, lorsque les vagues se fracassent sur la roche.
Combien d’accents à « Estérel », un, deux, trois, aucun ? Grave question. La plupart des sites, affiches, publicités ou guides en mettent un. En fait il n’y en a pas, on doit écrire Esterel, sans aucun accent, aigu ou grave. Dixit le Robert, suivi par Wikipedia.
A propos de l’Esterel, je me souviens d’un livre, d’un passage plutôt, car j’ai oublié le titre et l’auteur, ou peut-être était-ce un article, ou une nouvelle. Mais le passage, bizarrement, alors même que je ne connaissais pas du tout la région, m’a marqué, est resté. Curieux comme, selon les personnes, ce sont des choses différentes qui marquent, dont on se souvient, on peut lire le même livre, et avoir des souvenirs épars totalement différents. Untel se rappellera toute sa vie d’un passage anodin que l’autre aura complètement oublié, et réciproquement.
Toujours est-il que le passage en question est le suivant, cité de mémoire évidemment. L’auteur du livre est une femme, elle parle de son père. Son père qui n’avait jamais vu la mer, jusqu’à l’âge de 30 ou 35 ans, et qui finalement la découvre dans l’Esterel, et là c’est un choc, les rochers rouges qui tombent dans la Méditerranée, le contraste, la violence, la beauté. Par la suite, il voyagera plus souvent, verra la mer ailleurs, l’océan, dans d’autres régions, sous d’autres latitudes. La mer languissante des marées du nord, la mer transparente des tropiques, la mer grise de la Manche, l’océan calme ou en furie. Mais pour lui, jusqu’à la fin de sa vie, il n’y aura qu’une seule mer, celle de l’Esterel, celle de sa première rencontre, celle du rouge sombre du porphyre volcanique rencontrant la grande bleue.
Chacun a sa mer, bien sûr, selon la façon dont il l’a abordée en premier. On pourrait même dire qu’on n’a qu’une seule mer… Pour moi par exemple, ce sera toujours celle des marées et des courants, la mer froide et opaque de l’Atlantique, pas la mer transparente et statique de la Méditerranée ou des tropiques. Celle du Fier d’Ars, avec le flux et le reflux constant à l’entrée resserrée, devant le bois de Trousse-Chemise, celle qui s’en va pour laisser la place au pêcheur à pied ou au promeneur, celle dont la force entraîne le nageur ou le voilier, celle des bancs de sable du Bûcheron. Celle avec laquelle il faut composer en bateau, utiliser le vent contre le courant, ou l’inverse, ou encore jouer du contre-courant avec l’aide du vent. Hugo toujours a bien décrit ce combat:
L’homme est en mer. Depuis l’enfance matelot,
Il livre au hasard sombre une rude bataille.
Pluie ou bourrasque, il faut qu’il sorte, il faut qu’il aille,
Car les petits enfants ont faim. Il part le soir
Quand l’eau profonde monte aux marches du musoir.
Il gouverne à lui seul sa barque à quatre voiles.
…
Lui, seul, battu des flots qui toujours se reforment,
Il s’en va dans l’abîme et s’en va dans la nuit.
Dur labeur ! tout est noir, tout est froid ; rien ne luit.
Dans les brisants, parmi les lames en démence,
L’endroit bon à la pêche, et, sur la mer immense,
Le lieu mobile, obscur, capricieux, changeant,
Où se plaît le poisson aux nageoires d’argent,
Ce n’est qu’un point ; c’est grand deux fois comme la chambre.
Or, la nuit, dans l’ondée et la brume, en décembre,
Pour rencontrer ce point sur le désert mouvant,
Comme il faut calculer la marée et le vent !
Comme il faut combiner sûrement les manoeuvres !
Les flots le long du bord glissent, vertes couleuvres ;
Le gouffre roule et tord ses plis démesurés,
Et fait râler d’horreur les agrès effarés.
Belle allitération en ‘r’ : Et fait râler d’horreur les agrès effarés.
Hergé s’est inspiré de l’Île d’Or, près de St Raphaël, pour son Île Noire*
On est au point de départ de l’Esterel, voir plan avec relief ici, ou là.
* L’album date de 1938, l’action se déroule en Ecosse, loin de la Méditerranée, on assiste aux débuts de la télévision, notamment lors du meeting de voltige aérienne retransmis, gagné involontairement par les Dupondt qui s’embarquent dans un biplan et se retrouvent sans le pilote.
Autres photos de l’Esterel.
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8 janvier 2012 à 12:10 |
Merci pour votre blog! Grâce à vos chroniques on se sent toujours un peu un enfant du Capitaine Grant… De merveilleux paysages en merveilleux paysages et toujours une touche didactique pour ne pas voyager stupide!
10 janvier 2012 à 13:27 |
superbes photos, dommage qu’on aie pas eu le temps de la faire avec vous ! bravo pour la dernière photo à contre-jour, très belle.
10 janvier 2012 à 13:38 |
Moi j’aime bien celle-là, sur l’autre fil, quand on avance à pas mesurés, pour ne pas déranger les grosses bêtes, dans une atmosphère irréelle.
10 janvier 2012 à 21:41 |
c vrai, chouette aussi, avec super contraste des couleurs