Émigrer au Brésil, en 1827

olbers

n’était pas une mince affaire. En témoigne le cas des fondateurs allemands du village de Dois Irmãos, dans la Serra Gaúcha, à une cinquantaine de km au nord de Porto Alegre. Grâce à la nappe en papier d’un café du coin, évoquant l’histoire, et l’aide d’internet, on peut retracer cette odyssée Veleiro Cacilia. L’Allemagne à l’époque n’était pas le pays riche qu’on connaît, mais un ensemble d’Etats indépendants, une trentaine, tous ruraux, pauvres et arriérés, marqués par l’absolutisme et les survivances du Moyen Âge. L’unité allemande, avec le IIème Reich de Bismarck, ‘par le fer et par le sang’ selon les mots mêmes du grand homme, est encore dans le futur. L’industrialisation aussi, qui ne commence que vingt ans plus tard, avec la découverte du charbon de la Ruhr, en 1849. Dans ce contexte, partir pouvait sembler à beaucoup comme la meilleure solution, même vers l’inconnu complet, dans un pays encore vierge, où tout était à construire. C’est le Rio Grande do Sul, et la montagne proche, aux paysages européens, qu’on a dû vanter à ces émigrés de Rhénanie. Mais quelle aventure pour y arriver :

Johann Spindler, émigrant sur le Cécilia, dans une lettre envoyée de Falmouth en 1828 à son frère, raconte : « Le voilier, un trois mâts hollandais, parti de Brême le 6 janvier 1827, fut surpris dans la Manche par une tempête le 12. Le bateau perdit ses mâts, ainsi que 20 colons et deux marins, puis il fut secouru par un navire anglais qui le remorqua jusqu’à Falmouth. » Les 350 passagers durent attendre presque deux ans dans la ville, dans une situation de pénurie, tout juste secourus par les habitants, avant de pouvoir trouver un autre navire. Finalement, le James Lainge, sous pavillon anglais, parti le 2 janvier 1829, les transporta jusqu’à Rio, où ils arrivèrent un mois plus tard, le 8 février. Un caboteur, le Florinda, permit enfin aux émigrants d’arriver à Porto Alegre. Encore plus d’un mois de voyage, du 10 avril au 13 mai 1829. Ils s’établirent dans le hameau de Baumschneis, devenu plus tard Dois Irmãos, ou São Miguel dos Dois Irmãos.

Des détails du quasi naufrage sont donnés sur ce site :

Le père Theodor Amstad recueillit il y a un siècle des témoignages de passagers du Cécilia : « Le navire fut pris par une forte tempête dans la Manche. Quand le commandant le jugea perdu, il abandonna le navire grâce aux embarcations de sauvetage, laissant les émigrants sur l’épave… Le voilier donnait de plus en plus de la bande et ses occupants voyaient arriver la fin, quand l’un d’eux, un certain Altmayer, proposa que si par miracle ils arrivaient au Brésil, ils fassent immédiatement la promesse qu’ils consacreraient un jour férié au souvenir de ce moment, et que la coutume se perpétue avec leurs descendants. Dieu à sa manière écouta cette supplique. Pour que le bateau se redresse, il fallait se débarrasser des mâts. Un charpentier, Philip Schmitz poussa les autres à les couper et la proposition fut aussitôt acceptée. En bons artisans, Schmitz et ceux qui l’aidèrent arrivèrent à leur but. Le bateau se redressa, en restant bien sûr une épave impossible à manœuvrer, allant totalement à la dérive. Ce qu’il fit encore pendant deux semaines, avant qu’un navire anglais le trouve et le conduise au port le plus proche, Plymouth.

Les deux histoires varient quelque peu, notamment sur le port d’arrivée, Falmouth dans un cas, Plymouth dans l’autre, mais l’essentiel est identique. L’image du haut est celle d’un voilier du même genre que le Cécilia, l’Olbers, transportant également des émigrants vers le Brésil à la même époque. Le peintre est Carl Justus Fedeler (1799-1858).

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3 Réponses to “Émigrer au Brésil, en 1827”

  1. Claire Says:

    Sympa, c’est oú le « café du coin » ?
    L’histoire rappelle celle du frère russe dans « World without End », il restait 1 an ou 2 en Irlande, non ?
    Ou celle de la « Saga des Émigrants », pas des allemands, mais des suédois !
    Bon c’est sûr que le Brésil est plus á la mode en ce moment 🙂

  2. JB Says:

    Au bled en question, Dois Irmãos.
    Oui, le frère qui devenait un gangster ensuite aux US avec la prohibition, au temps de Capone… Il doit revenir dans le deuxième tome non ?

  3. Dans l’œil du cyclone | Le journal de Joli Rêve Says:

    […] Émigrer au Brésil, en 1827 […]

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