Réalisme, expressionnisme, cubisme, surréalisme, dadaïsme, tout ça…

Tableau célèbre d’Edward Hopper qui évoque la solitude de la vie moderne, il date des années 1950, époque bénie pourtant en Amérique, après la paix chèrement gagnée. Les deux personnages semblent attirés l’un par l’autre, mais restent à distance, ne franchissent pas la barrière de leur anonymat.

Les années cinquante sont celles de « la plus grande génération », the greatest generation, celle qui a surmonté la grande dépression, vaincu les nazis et les Japonais en 1945, repris des études au retour de la guerre grâce au GI Bill, lancé définitivement la société de consommation sur les rails (après la première tentative avortée des années 1920). C’est l’âge d’or de l’Amérique, une période de tranquillité et de prospérité, entre la guerre mondiale et les crises qui vont s’ouvrir dans les années 1960 avec le Vietnam. C’est la période que peint Hopper, dont les toiles ne prêtent guère pourtant à l’optimisme, la solitude et le désespoir étant des thèmes récurrents.

De la maison de l’artiste à Cape Cod (ci-dessous), le vide des pièces est censé aussi illustrer la solitude… Moins convaincant.

George Bellows, même école que Hopper :

Mais il n’y a pas que Hopper ou Bellows ici, il y a aussi toutes les pointures de l’art contemporain, tous les grands noms du XXe siècle.

Dans les années 1960, et dans tout l’après-guerre en réalité, les intellectuels se gaussaient des réactions populaires à la peinture moderne, à Picasso par exemple. Quand la concierge du coin ou la famille Michu faisaient des remarques du genre : « Ça ne ressemble à rien, ça n’a ni queue ni tête, un enfant pourrait faire pareil, ou n’importe qui en balançant le pinceau dans tous les sens, etc. », l’intelligentsia ricanait en criant aux beaufs (avant la lettre), aux imbéciles, aux attardés qui ne comprenaient rien à l’art, qui ne comprenaient pas que la peinture ne devait pas copier la réalité, singer la réalité, ressembler à des photos, mais que l’oeuvre était une création en elle-même.

Naturellement l’intelligentsia ne comprenait pas davantage que la concierge du coin le sens des peintures modernes, elle jouait simplement un rôle, faisant semblant d’être éclairée, au courant. Elle ne comprenait pas car il n’y avait rien à comprendre, elle tombait dans le pur snobisme, jouant des sortes de précieuses ridicules modernes.

Je me souviens de ma mère à l’époque, qui avait des goûts artistiques, qui me faisait des grands discours, quand dans ma candeur d’enfant je lui disais que ça ne ressemblait à rien et que c’était simplement très laid. Mais le snobisme était tel, la bien-pensance artistique et intellectuelle était telle, qu’il fallait finalement en passer par là, abandonner tout sens critique, et crier au génie avec les autres.

Les décennies ont passé, et quand je vois ça maintenant dans les musées, je me demande si ce n’était pas l’enfant, la concierge, la famille Michu, qui, dans leur simple bon sens, avaient raison. A côté des chefs-d’œuvre du passé, l’art moderne tient en grande partie de la pure et simple fumisterie. Dans le fatras de la section du musée de Yale qui lui est consacré, les trois-quarts sont sans intérêt à mon humble avis. Quelques toiles surprennent cependant, et pour quelqu’un qui ne connaît pas grand-chose à l’art, qui aime les tableaux simplement par l’effet qu’ils produisent, de façon instinctive, je choisirais ceux-là :

Plusieurs tableaux de la période cubiste de Picasso figurent ici, dont celui-là, Premiers pas. Le musée nous explique que l’artiste l’a peint en 1943, comme une métaphore sur l’Occupation, et la France qui se libérait peu à peu. Bon, pourquoi pas, mais on peut quand même préférer sa période bleue ou rose.

George Grosz nous restitue toute l’ambiance troublée de la république de Weimar, l’hyperinflation, la ruine des classes moyennes, les fortunes outrageuses, l’impossibilité de surmonter la défaite, tout comme Brecht et Weill et leur Opéra de quat’sous, son oeuvre nous plonge dans un univers de malaise.

Je ne connais pas très bien ce peintre, il paraît que c’est du surréalisme, tout ce que je sais c’est que le personnage à droite dans cette procession ressemble à Sarkozy, c’est assez rigolo. Il devait beaucoup aimer les femmes aussi, et le corps de la femme, elles sont d’une sensualité rare, et les situations très érotiques.

Magritte, c’est spécial, mais ça ne laisse pas indifférent, pourquoi ça s’appelle La boîte de Pandore, mystère et boules de gomme…

Enfin, Salvador Dali (Avida Dollars pour les intimes), son chariot fantôme est pas mal ici, bien que la plupart de ses toiles soient torturées inutilement, d’un baroque fantastique et chargé qui tombe dans l’excès absurde, là c’est sobre pour une fois :

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6 Réponses to “Réalisme, expressionnisme, cubisme, surréalisme, dadaïsme, tout ça…”

  1. jycaro Says:

    Sarkozy, c ‘est bien vu et tellement drôle!

  2. jycaro Says:

    Défense du sens commun qui ne manque pas de panache.
    Les Précieuses Ridicules recrutent en masse au temps des « installations », d’internet et de l’art comme ultime religion.
    La dynamique du champ artistique n’est-elle pas fascinante pour tout économiste un peu frotté de Bourdivineries ?
    (Détail: la Corée et la Guerre froide? Avant le Vietnam…)

    • JB Says:

      Oui, c’est vrai, la Corée et la grande peur des années 1950… Difficile de trouver un moment de répit dans l’histoire, surtout quand on devient la première puissance mondiale. La guerre de Corée apparaît d’ailleurs dans le dessin de Lichtenstein, ‘Blam’, un Sabre touché. Les Sabre contre les Mig-15 à l’époque. On les retrouve dans les aventures de Buck Danny, pour les amateurs de BD. Le graphisme n’est d’ailleurs pas loin de celui de Lichtenstein.

  3. JB Says:

    http://fr.wikipedia.org/wiki/North_American_F-86_Sabre

  4. JB Says:

    http://fr.wikipedia.org/wiki/Mikoyan-Gourevitch_MiG-15

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