S’il est un artiste oublié, c’est bien lui, même pas une notice dans Wikipedia, même pas une référence dans le dictionnaire des noms propres ! Richard Hall, malgré son nom, est un peintre français du XIXe, d’origine finlandaise… Ce tableau d’une sortie de l’église (au MFA de St Petersburg), un baptême apparemment, nous donne une idée de la France d’antan. On est à St Germain des Prés (l’affiche à gauche le rappelle), devant le portail de cette magnifique abbaye romane au cœur de la rive gauche, la division de classe est flagrante, dans les vêtements, dans les attitudes, dans les regards, le pouvoir ecclésiastique avec la none, et le pouvoir d’Etat avec le policier, sont là également. Toute la nostalgie d’une France qui n’existe plus… Une critique locale en parle très bien :
I wrote earlier that I like stories. With a caveat. I don’t like sentimental ones, those that bang me over the head with a message, those without subtlety. This painting by Richard Hall teeters on that thematic line. It’s an obvious statement about social classes gathered together on a church’s steps, also a bit obvious. The wealthy little girl and her mother have their backs to us, but we know they’re pretty. The poor mother and her children who face us are expectably careworn. Cue the sad violins. Yet the richness of white against dark that floats through the painting — the lace on a baby’s gown, the feathers on a stylish bonnet, the winged headcovering of a nun — trumps my reservations. I love this painting; to heck with its cliches.
Pour les amoureux du XIXe siècle, les nostalgiques de son histoire, de sa littérature, de ses artistes et de ses penseurs, le voyage à travers la peinture européenne de l’époque, quel que soit le musée, est un régal. On peut sélectionner quelques œuvres du musée des beaux-arts de St Petersburg, en Floride. Jacques-Emile Blanche est plus connu, bien qu’il soit sorti également de nos radars, c’est lui qui est l’auteur du fameux portrait de Proust, au musée d’Orsay. Mais il a peint aussi Henry James, James Joyce, Virginia Woolf. Ici est sans doute sa plus belle oeuvre, Contemplation, évoquant toute une époque, Verlaine, l’absinthe, les guinguettes du bord de Marne, les nouvelles de Maupassant
Jean-François Raffaëlli, plus connu pour ses Buveurs d’absinthe, nous offre ici une oeuvre inspirée des Misérables (pourquoi Jean Valjean a été envoyé au bagne), avec L’homme aux deux pains :
Alfred Stevens est un peintre belge, célèbre sous le Second Empire, ami de Manet, Degas, Baudelaire, Delacroix, aimant représenter les tenues élégantes, et expert dans la représentation des étoffes et drapés, comme on le voit ici dans cette Femme au bord de la mer.
Il y a un côte préraphaélite chez Jules-Joseph Lefebvre, dans ce portrait de Julia Foster Ward. Morte à 21 ans, en 1878, ses parents commandent ce portrait posthume au peintre, les fleurs dans la chevelure évoquent la brièveté et la fragilité de la vie, rappelant le poème de Malherbe.
Eugène Fromentin, peintre et écrivain, auteur d’un classique du romantisme, Dominique, à la fois roman d’apprentissage et roman d’un amour impossible, répond ici à l’engouement de l’époque pour le monde arabe et l’Afrique du Nord, où il séjourne à trois reprises.
Qui se souvient de Jacques Lusseyran, écrivain et résistant, atteint de cécité à l’âge de 8 ans, il meurt avec sa troisième épouse en 1971 dans un accident de voiture, à 47 ans. Le fait d’être aveugle ne l’a pas empêché de mener une vie normale, et même hors du commun, déporté à Buchenwald en 1944, il termine sa carrière aux Etats-Unis, professeur de littérature française en Virginie et à Hawaii. Titres magnifiques de ses livres, liés à son état : Et la lumière fut, Ce que l’on voit sans les yeux, La cécité : un nouveau regard sur le monde. Il est peint ici par Jean Hélion, qui a suivi l’évolution inverse de la plupart de ses pairs : de l’abstrait au figuratif.
On part enfin sur les bords du Nil, quelque temps après l’expédition de Bonaparte, avec ce Charmeur de Serpents de Karl Wilhelm Gentz.
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