C’est une péninsule !

Carentan, son canal vers la mer, fin de la péninsule du Cotentin côté sud-est

Le tour du Cotentin, de Granville à Carentan, c’est plus court et moins varié que le tour de la Bretagne, mais grâce aux îles anglo-normandes, à Chausey, au cap de la Hague, Cherbourg, St Vaast et Tatihou, la croisière est néanmoins superbe. Sans compter les terribles raz Blanchard et raz de Barfleur, à aborder avec moult précautions. Comme le dit Tom Cunliffe dans son superbe (et utile) guide, les courants font le tour du Cotentin à la vitesse d’un cheval au galop, ce qui rend la navigation passionnante, et délicate. Aucune traversée de plus de six heures ne peut éviter pendant un temps des courants contraires, le tout est d’optimiser.

Carte de 1693

Itinéraire détaillé.

Adieu à Granville, sa marina en plein centre, son cap, et ses papayes !

Jersey :

Guernesey
Plus sympa que Jersey, centre resserré sur le port, à Jersey c’est trop grand et trop bétonné. Et puis il y a la maison de Victor Hugo, Hauteville house, dans un site incomparable. Le cabinet de travail du poète, tout en haut, il paraît qu’il écrivait debout :

Depuis la terrasse de Hauteville house, vue sur le port et l’île de Sercq

Le raz Blanchard
En partant de Guernesey pour aller à Cherbourg, on n’échappe pas au raz Blanchard, les plus forts courants d’Europe, une mer dangereuse lorsque vent et courant sont opposés. Heureusement, nous partons ce jour-là avec une petite marée (coefficient 35) et un bon vent arrière (20 nœuds). La première partie est néanmoins très pénible, le vent et le courant sont contraires, le bateau roule énormément, les remous nous suivent pendant trois heures. Mais arrivés dans le raz proprement dit, entre Alderney (Aurigny) et le cap de la Hague, l’heure est à la renverse, vent et courant vont dans le même sens et la mer s’aplatit progressivement. Le dernier bord, vers Cherbourg, est une partie de plaisir.

Cherbourg

Très beau musée des beaux-arts, le musée Thomas Henry, derrière le théâtre.

Lancement du Friedland à Cherbourg, le 4 avril 1840, peinture d’Antoine Chazal

Le raz de Barfleur
Il est réputé encore plus dangereux que le Blanchard, des naufrages célèbres y ont eu lieu, dont un navire normand (la Blanche Nef) où Guillaume le conquérant perd deux de ses fils et cent hommes de sa noblesse, ou encore le naufrage de La Luna, un trois-mâts américain, en 1860. Mais à la différence du raz Blanchard, on peut le contourner facilement, en restant bien au large pour passer le cap, à quatre milles d’après les guides, ce que nous appliquerons à la lettre, mêmes si les conditions étaient favorables ce jour-là. Notice sur le phare de Gatteville.

Cimetière marin à Barfleur, le phare de Gatteville au loin

St Vaast la Hougue
Le plus joli port du Cotentin sans doute, une belle surprise, on y resterait bien… Et les bateaux qui sont là ne s’y trompent pas. Et l’île de Tatihou à côté, un petit paradis qu’on peut rejoindre à pied à marée basse, ce qui ajoute au côté exotique/aventure, sans compter l’extraordinaire presqu’île au sud, et les fortifications de Vauban (agrémentées çà et là par quelques bunkers du mur de l’Atlantique…).

Un plan anglais du XVIIe de St Vaast, La Hougue et Tatihou. Pas de port à l’époque, on mouillait entre l’île et la presqu’île, entre les fortifications de Vauban

Arrivée le soir au soleil baissant à St Vaast après le cap de Barfleur, passage devant l’île de Tatihou, à marée haute évidemment (sinon le port est fermé). Les deux parties vues ici n’en forment qu’une à marée basse.

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Quelques bateaux anciens dans le port de St Vaast (prononcer « St Va »), d’abord notre voisin, une barge de la Tamise, entretenue par un charmant Anglais vivant dans le coin, Sybil of Wivenhoe. Ensuite L’Ami Pierre, barque à voile toute noire, et le Nel, un bateau écossais flush deck tout blanc, qui servait à faire le tour des pêcheurs pour l’office religieux, en mer, avec des vitraux dans les hublots ! Enfin, le Fleur de Lampaul, « monument historique », arrivée surprise un matin.

Le site de St Vaast-Tatihou est enfin celui d’un désastre pour la marine française en 1692, sous l’amiral de Tourville, 12 navires incendiés par les Anglo-Hollandais. Et un mot célèbre de Louis XIV, qui confirme celui de Saint-Simon sur le souverain :
« Tourville est-il sauvé ? On peut trouver des vaisseaux, mais on ne trouve pas aisément des hommes comme lui. »
« Louis n’avait que du bon sens, mais il en avait beaucoup. » (Saint-Simon)

Carentan
On part de St Vaast dès que les portes ouvrent, à marée montante, car il faut également arriver au chenal et à l’écluse de Carentan à marée haute, à trois heures et quelques de là, en fonçant à 7/8 nœuds, soit 8h30 le matin pour arriver à 11h devant l’écluse. On passe au vent des îles St Marcouf, et sous le vent de Utah beach, avant d’atteindre la bouée d’atterrissage du chenal. Vent frais ce matin-là du sud-ouest, soit travers-bon plein, et moteur à la rescousse pour maintenir la vitesse requise.
Port champêtre et si charmant de Carentan. Grand calme et nature.

Vue complète de Carentan :

Des combats terribles s’y sont déroulés en juin 1944, corps à corps à la baïonnette entre les Américains aéroportés (101e Airborne) et une division SS occupant la ville. Outre les soldats, 50 civils tués dans la petite cité. Cérémonies tous les six juin.

Suite : balades en voiture et randonnée, Cap de la Hague, Port Racine, Valognes.

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3 Réponses to “C’est une péninsule !”

  1. jeanclaudehubi Says:

    La France dépossédée des îles normandes ! C’est notre Taïwan à nous ! Armons les ports proches, préparons l’invasion !

    (un moment j’ai eu peur : tu dis « Thula Thula dans le fond », j’avais lu « Thula Thula par le fond »…

  2. michelherland Says:

    Pour les natifs du sud de la Loire transportés autour du et dans le Cotentin grâce au valeureux skipper (mais où est il sur les photos ?) de Thula Thula, la découverte d’icelui, de surcroît par de belles journées de printemps, fut un enchantement que l’approche du terrible raz Blanchard n’a pas pu ternir.
    Quant aux îles anglo-normandes, la maison de V. Hugo justifie largement le détour. Et même un voyage dont elle serait l’unique but.

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